Les Z'otres Z'infos - Les contrôles exercés par les Préfets

Publié le par Ah ! l'Info !

(sources : rapport annuel de la Cour des comptes, rendu public le 10 février 2016).

(sources : rapport annuel de la Cour des comptes, rendu public le 10 février 2016).

Faut-il croire que si les documents ne sont pas retournés par la préfecture c’est qu’ils sont bons ? (propos tenus par Monsieur Johann Baranger lors du Conseil municipal du 24 mars 2016).

Nous allons voir que ce lien de causalité ne se vérifie pas systématiquement !

 

La décentralisation permet aux collectivités (communes, départements, régions, groupements ….) de s’administrer librement par des conseils élus ; elle confie ressources et décisions au niveau local qui dispose d’un pouvoir réglementaire pour l’exercice de ses compétences.

La Loi constitutionnelle affirme le principe de l’égalité de tous les citoyens devant la loi.

 

Les Préfets, représentants de l’Etat dans les départements,  « ont la charge des intérêts nationaux, du contrôle administratif et du respect des lois ». Ils sont les garants de l’application uniforme de la règle de droit sur tout le territoire ».

 

Les Préfets assument ce rôle régalien au moyen d’un double contrôle :

sur les actes des élus pour vérifier la conformité de ces actes avec les dispositions législatives et réglementaires en vigueur, c’est le contrôle de légalité.

 

sur le respect des règles comptables applicables à l’élaboration, l’adoption et l’exécution des budgets, c’est le contrôle budgétaire.

 

Cependant ces contrôles trouvent très vite leurs limites.

Le contrôle se fait à postériori après la simple transmission des documents correspondants aux services de la Préfecture.

 

Pour l’exécutif des collectivités, cela implique, seulement, le respect de la transmission systématique de l’ensemble des pièces obligatoires (délibérations, arrêtés, décisions, marchés publics, emprunts, budgets).

Pour les services préfectoraux, cela conduit à traiter un nombre considérable d’actes, de nature et d’importance diverses, de complexité croissante, dans un environnement sensible. Pour les contrôles des budgets prévisionnels, ils ne disposent que d’une courte période de deux mois dans l ‘année – mars avril.

 

Le délai d’instruction donné aux services préfectoraux est de 2 mois à compter de la transmission des documents.

 

La puissance régalienne des Préfets est limitée par le fait qu’un acte qu’ils considèrent contraire à la légalité ne peut être annulé que par le Tribunal administratif. Les Préfets ne disposent que du recours gracieux.

 

De même, lorsque les Préfets identifient une méconnaissance des dispositions du code général des collectivités locales, ils ne peuvent que saisir les chambres régionales des comptes ; « celles-ci exercent alors une mission consultative de nature administrative et non juridictionnelle.

Les rectifications, les mesures de redressement, les mises en demeure relèvent de la seule compétence des chambres ».

Les Préfets peuvent se substituer à une collectivité seulement pour arrêter un budget en suivant ou non les propositions des Chambres.

 

Le périmètre des contrôles a été réduit à certaines priorités définies au plan national.

« Le contrôle de légalité se limite entre autre aux commandes publiques, à l’urbanisme et à la fonction publique territoriale ».

Le contrôle budgétaire ne se porte que sur les collectivités locales « choisies par les Préfets et les directions départementales des Finances publiques à partir de ratios d’analyse financière ».

« Le contrôle se porte sur le respect de la date limite du vote, sur l’équilibre – dépenses et recettes, sur les déficits et sur l’inscription des dépenses obligatoires ».

Sinon le contrôle est aléatoire ; il se limite à la forme (conditions d’adoption des budgets et présence des annexes budgétaires obligatoires) et nullement au fond (aucun calcul, aucun contrôle sur les montants).

 

Les moyens humains et techniques mis à la disposition des services préfectoraux sont limités et peu opérationnels.

« L’outil informatique utilisé se limite à cinq contrôles budgétaires (montant des dépenses imprévues, équilibre des chapitres d’ordre, équilibre des sections, couverture de l’annuité de la dette et le montant du déficit du compte administratif) ».

Une baisse nationale des effectifs de 30% et une qualification des effectifs qui n’a pas évoluée (très peu de cadres A) entraînent une diminution du nombre d’actes contrôlés et les suites qui leur sont réservées sont très limitées. « (Au niveau national, 0,7% des actes reçus ont donné lieu à une lettre d’observation et 0,1% des actes contrôlés ont été transférés au juge administratif) ».

« En Somme aucun contrôle n’a été effectué sur deux années consécutives ».

« Au niveau national le contrôle de légalité porte sur 24% des actes reçus ».

« En Deux-Sèvres il représente moins de 15% des volumes d’actes reçus ».

« En Saône-et-Loire, où le contrôle budgétaire était assuré par un seul agent, le nombre de collectivités prioritaires ne s’élevait qu’à cinq en 2014. Or les contrôles réalisés au-delà des deux mois ont découvert 49 budgets votés en déséquilibre en 2012… »

 

Faute de moyens, les Préfets utilisent plus largement leur pouvoir d’appréciation.

 

« Les Préfets dispose d’un large pouvoir d’appréciation sur les suites à donner au contrôle de légalité qui, lorsqu’il est poussé trop loin, peut contribuer à affaiblir l’efficacité du contrôle. »

 

De même « si la saisine de la Chambre régionale ne soulève généralement pas de réticence en cas d’absence de vote budgétaire », elle est rarement saisie « en cas de déséquilibre budgétaire ou de déficit d ‘exécution ».

 

Au niveau national, les Préfets « privilégient la fonction de conseil, moins formelle que les lettres d’observations valant recours gracieux ou les saisines du juge administratif ».

Cependant « ce conseil délivré en aval d’un acte soulève une question de principe au regard de la mission constitutionnelle de contrôle de légalité ».

 

Cette enquête réalisée par la Cour des Comptes a mis en lumière les limites des contrôles exercés par les préfectures.

 

Faut-il pour autant donner un blanc seing à nos élus

et penser que toutes leurs décisions sont conformes aux Lois et aux Règlements ?

Vu la complexité et le foisonnement de ces textes,

ce serait sûrement surestimer leurs compétences ?

 

Faut-il ouvrir aux citoyens et aux associations une possibilité de contester

la légalité des actes des collectivités territoriales devant les juridictions administratives ?

et permettre à tout contribuable de saisir la Chambre régionale des comptes ?

 

Publié dans Finances

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